AURI SOCIAL - Sandrine MAHILLON
Actualités juridiques

Ordonnances MACRON - Des simplifications en matière de licenciement économique

  • 25 Janvier 2018

AURI SOCIAL - Actualités juridiques en droit du travail et droit social

Ord. 2017-1386 et 2017-1387 du 22-9-2017 : JO 23

1) Le périmètre d'appréciation du motif économique est limité et précisé

Un cadre d'appréciation limité au niveau national :

Il est désormais précisé que les difficultés économiques, les mutations technologiques et la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise, susceptibles de justifier un licenciement économique aux termes de l'article L 1233-3 du Code du travail, s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient, mais seulement dans celles établies sur le territoire national (C. trav. art. L 1233-3, al. 12 nouveau).

Il résulte des nouvelles dispositions que 3 cas de figure peuvent être distingués :
- l'entreprise ne fait pas partie d'un groupe : la cause économique est appréciée au niveau de l'ensemble de l'entreprise ;
- l'entreprise fait partie d'un groupe composé de sociétés uniquement implantées en France : la cause économique doit être appréciée au niveau du secteur d'activité commun à la société concernée par le licenciement et à celui des autres entreprises du groupe, comme le prévoyait la jurisprudence jusqu'à présent ;
- l'entreprise appartient à un groupe de sociétés de dimension internationale : ne sont prises en compte que les seules entreprises établies en France et le motif économique doit être constitué, comme dans le cas précédent, au niveau du secteur d'activité commun à ces entreprises.

La notion de groupe est précisée…

L'ordonnance 2017-1387 donne une définition légale du groupe au niveau duquel doit être apprécié le motif économique, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent. Elle le définit conformément au I de l'article L 2331-1 du Code du travail relatif au comité de groupe, c'est-à-dire par référence au droit commercial, lorsque le siège de l'entreprise dominance est situé sur le territoire français. Dans le cas contraire, le groupe est constitué par les seules entreprises implantées sur ce territoire (C. trav. art. L 1233-3, al. 13 nouveau).

...de même que celle de secteur d'activité

La notion de secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique n'était pas non plus précisée par les textes jusqu'à présent. Pour sa part, la jurisprudence n'en a pas donné une définition claire, sinon pour dire que qu'il ne peut pas s'identifier à une simple spécialisation d'une entreprise dans un produit déterminé.

L'ordonnance 2017-1387 comble cette lacune en fixant des critères : le secteur d'activité est désormais caractérisé, notamment, par la nature des produits, biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché (C. trav. art. L 1233-3, al. 14 nouveau).

L'adverbe « notamment » indique que la liste n'est pas limitative ; le juge devrait donc pouvoir recourir à d'autres critères.

Des modifications applicables immédiatement.

Les dispositions ci-dessus sont applicables aux procédures de licenciement économique engagées après la publication de l'ordonnance au Journal officiel (Ord. art. 40), c'est-à-dire engagées depuis le 24 septembre 2017.

2) L'obligation de reclassement devient moins contraignante :

L'employeur reste tenu, en vertu de l'article L 1233-4 du Code du travail, de rechercher à reclasser le salarié menacé de licenciement économique dès l'instant qu'il projette une mesure de compression des effectifs. Toutefois, l'article 16 de l'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 restreint le périmètre de cette recherche et adapte les obligations en matière de proposition de reclassement.

Une notion plus restrictive du groupe de reclassement :

L'ordonnance insère dans le Code du travail la solution dégagée de longue date par la Cour de cassation obligeant l'employeur, lorsqu'il appartient à un groupe, de rechercher un poste de reclassement dans toutes les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Mais elle retient une notion restrictive du groupe de permutation : Elle retient donc une notion économique du groupe, comme pour le périmètre d'appréciation du motif économique (C. trav. art. L 1233-4, al. 1 et 2 modifiés).

Ce n'est donc que si l'employeur appartient à un groupe au sens du droit commercial et s'il existe une possibilité de permutation de son personnel avec celui d'une ou plusieurs autres entreprises de ce groupe établies en France qu'il est tenu d'étendre sa recherche à celles-ci.

Cette nouvelle règle est applicable aux procédures de licenciement économique engagées après la publication de l'ordonnance au journal officiel (Ord. art. 40, V), c'est-à-dire engagées depuis le 24 septembre 2017.

A noter : Le Gouvernement met ainsi fin à la jurisprudence définissant le groupe de reclassement au regard du seul critère de la permutabilité des salariés, notion qui dépasse la définition du groupe issue du droit commercial. Par conséquent, en dehors de liens capitalistiques entre sociétés, un groupe de reclassement ne pourra plus désormais être retenu, par exemple, entre des magasins d'une même enseigne ou des associations ayant la même activité.

Par ailleurs, l'ordonnance supprime toute possibilité de reclassement à l'étranger (C. trav. art. L 1233-4-1 abrogé).

Les modalités de proposition de poste sont simplifiées :

Si les offres de reclassement faites au salarié menacé de licenciement économique doivent toujours être écrites et précises, elles n'auront plus, à l'avenir, à être nécessairement personnalisées. En effet, l'employeur aura le choix entre :
- adresser de manière personnalisée des offres de reclassement au salarié
- ou diffuser par tout moyen une liste de postes disponibles à l'ensemble des salariés.

3) Plus de souplesse pour fixer le cadre d'application des critères d'ordre des licenciements :

L'ordonnance pose désormais le principe que le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par un accord collectif et qu'à défaut d'un tel accord ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emplois dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emplois.

Ces zones d'emploi sont actuellement définies par l'article D 1233-2 du Code du travail comme étant celles référencées dans l'atlas établi par l'Insee et les services statistiques du ministère chargé de l'emploi et accessibles sur www.insee.fr et www.dares.travail-emploi.gouv.fr.

La possibilité, en l'absence d'accord collectif, de limiter le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements a minima à celui de la zone d'emplois serait donc étendue à toutes les entreprises procédant à un licenciement collectif non tenue d'établir un PSE : entreprise de moins de 50 salariés et entreprises d'au moins 50 salariés procédant à un licenciement collectif de moins de 10 salariés dans une même période de 30 jours.

Les nouvelles dispositions ci-dessus sont applicables aux procédures de licenciement économique engagées après la publication de l'ordonnance au Journal officiel (Ord. art. 40, V), c'est-à-dire engagées depuis le 24 septembre 2017.

4) Les règles de consultation des représentants du personnel sont adaptées pour tenir compte du CSE

Les dispositions du Code du travail relatives à la consultation des représentants du personnel dans le cadre d'un licenciement collectif sont adaptées par les ordonnances 2017-1386 et 2017-1387 du 22 septembre 2017 pour tenir compte de la création du CSE, regroupant les actuelles instances représentatives du personnel. Certains points de la procédure consultative sont davantage encadrés.

Les nouvelles dispositions sont applicables aux procédures de licenciement engagées dans les entreprises ayant mis en place un CSE (Ord. 2017-1387 art. 40, VI).

A noter : Les DP, le CE et le CHSCT restent compétents, dans les conditions en vigueur à la date de publication de l'ordonnance, jusqu'à la mise en place effective du CSE dans l'entreprise

5) La possibilité de licenciement avant transfert n'est plus réservée au plus grandes entreprises

En principe, en application de l'article L 1224-1 du Code du travail, en cas de transfert d'établissement, les contrats de travail subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise, le cédant ne pouvant pas prononcer de licenciements économiques à cette occasion. Toutefois, afin de ne pas décourager des repreneurs potentiels, la loi Travail du 8 août 2016 a levé cette interdiction dans le cadre d'un licenciement avec PSE à condition que ce plan comporte, en vue d'éviter la fermeture d'un ou de plusieurs établissements, le transfert d'une ou plusieurs entités économiques nécessaires à la sauvegarde d'une partie des emplois et que l'entreprise entende accepter une offre de reprise dans le cadre de l'obligation de recherche d'un repreneur prévue aux articles L 1233-57-9 et suivants dudit Code. Mais cette possibilité de licenciement avant transfert était réservée aux entreprises d'au moins 1 000 salariés, à celles appartenant à un groupe d'au moins 1 000 salariés ainsi qu'à celles de dimension communautaire ou appartenant à un groupe de dimension communautaire, qui ne sont pas en redressement ou liquidation judiciaire.

L'ordonnance supprime cette limite et toute référence aux dispositions relatives à la recherche d'un repreneur.

Désormais, toutes les entreprises tenues d'établir un PSE, donc ayant au moins 50 salariés, et souhaitant accepter une offre de reprise, peuvent licencier avant le transfert les salariés non repris par le cessionnaire, le transfert de droit des contrats de travail ne s'appliquant que dans la limite du nombre des emplois non supprimés à la suite des licenciements, à la date d'effet de ce transfert (C. trav. art. L 1233-61, al. 3 modifié).

Focus

AURI SOCIAL - Sandrine MAHILLON Maître Sandrine MAHILLON-LABASSE est titulaire de la mention de spécialisation en Droit du Travail.

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