AURI SOCIAL - Sandrine MAHILLON
Actualités juridiques

Conditions de la responsabilité pénale de l'entreprise en cas d'infraction aux règles de sécurité

  • 24 Janvier 2018

AURI SOCIAL - Actualités juridiques en droit du travail et droit social

Cass. crim. 17-10-2017 n° 16-87.249 F-PB ; Cass. crim. 31-10-2017 n° 16-83.683 FS-PB
La chambre criminelle de la Cour de cassation confirme et précise sa jurisprudence sur la nécessaire détermination, pour l'engagement de la responsabilité pénale d'une personne morale, de l'organe ou du représentant de cette dernière ayant commis des infractions pour son compte :

En cas d'accident du travail résultant d'un manquement aux règles de sécurité, la responsabilité pénale de la personne morale employeur (société civile ou commerciale, association…) peut être engagée dans les conditions prévues par l'article 121-2 du Code pénal.

Conformément à ce texte, et comme pour toute autre infraction, la personne morale ne peut être poursuivie et condamnée du chef d'un homicide ou de blessures involontaires que si l'infraction a été commise, pour son compte, par l'un de ses organes ou représentants.

Il n'y a pas de présomption d'imputabilité d'une faute à la personne morale ni pour les infractions en matière d'hygiène et de sécurité, ni pour une autre infraction. Il faut avoir identifié l'organe ou le représentant de celle-ci ayant commis l'infraction pour son compte ou en l'identifiant de manière imprécise.

La personne physique auteur de l'infraction pour le compte de l'entreprise peut être :
– son ou ses dirigeants de droit (le ou les cogérants d'une SARL par exemple)
– ou un dirigeant de fait
– ou, ce qui est assez fréquent dans ce domaine, le salarié titulaire d'une délégation des pouvoirs de l'employeur en matière d'hygiène et de sécurité, ou d'une subdélégation desdits pouvoirs.

Un salarié n'engage la responsabilité de l'entreprise que s'il a une délégation de pouvoirs (au moment de l'infraction).

Pour être valable, une telle délégation ou subdélégation suppose que le salarié concerné soit investi de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires à l'exercice de sa mission.

Les conséquences, pour la personne morale, de la responsabilité de principe du chef d'entreprise :

En vertu d'une jurisprudence ancienne et constante, il appartient au chef d'entreprise de veiller personnellement à la stricte et constante exécution des règles en matière d'hygiène et de sécurité édictées par le Code du travail ou les règlements pris pour son application (notamment Cass. crim. 11-5-2010 n° 09-86.045 F-D : RJS 11/10 n° 855 ; Cass. crim. 6-9-2016 n° 15 84.186 F-D).

C'est pourquoi la chambre criminelle décide de clarifier la situation par deux attendus de principe :
- l'un pour rappeler qu'il appartient aux juges du fond, lorsqu'ils constatent la matérialité d'une infraction non intentionnelle susceptible d'être imputée à une personne morale, d'identifier, au besoin en ordonnant un supplément d'information, celui des organes ou représentants de cette personne dont la faute, au sens de l'article 121-3, al. 2 et 3 du Code pénal, est à l'origine du dommage ;
- l'autre pour préciser qu'il en va ainsi du représentant légal qui omet de veiller lui-même à la stricte et constante mise en œuvre des dispositions édictées par le Code du travail et les règlements pris pour son application en vue d'assurer la sécurité des travailleurs, à moins que ne soit apportée la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à un préposé investi par lui et pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires au respect des dispositions en vigueur.

Le juge ne peut donc pas prononcer la relaxe de l'entreprise, personne morale, du chef d'homicide involontaire, sans rechercher si le dirigeant de celle-ci, faute d'avoir délégué ses pouvoirs, avait veillé personnellement à l'exécution constante et effective des obligations particulières de sécurité dont la violation avait été à l'origine de cet accident.

A noter qu'une faute peut d'ailleurs être reprochée à l'employeur lorsqu'il ne délègue pas ses pouvoirs alors que la taille ou l'organisation de son entreprise ne lui permettent pas de veiller lui-même à l'application constante et effective des règles de sécurité (Cass. crim. 4-1-1986 n° 84-94.274).

Focus

AURI SOCIAL - Sandrine MAHILLON Maître Sandrine MAHILLON-LABASSE est titulaire de la mention de spécialisation en Droit du Travail.

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